Friday, July 13, 2012

Détournement à Mahazoarivo: Menace des militaires au Premier ministre



Samedi 14 juillet 2012

Désolé, on sera triplement désolé si vous ne prenez pas votre responsabilité. Ainsi conclut une lettre du BSP (Bataillon de sécurité de la primature) qui est destinée au Premier ministre. « Il le trouvera sur son bureau demain matin ‘ce jour », nous promet les deux éléments qui ont remis à la rédaction cette lettre.
          Quoique sous forme de tract, le document ne confirme pas moins les rumeurs qui circulent dans le milieu politique depuis quelques jours : l’existence de détournements au sein du BSP. La lettre alerte notamment le Premier ministre sur les faits. On cite, entre autres, « le gonflement de la liste des ayant droit aux primes liées à la fonction, la mauvaise qualité des repas servis aux soldats alors que les factures sont énormes, le paiement de la PGA (prime générale d’alimentation) selon le bon gré du responsable, l’utilisation du crédit de téléphone et des chèques de carburant d’un montant total de 100 millions Ar au seul bénéfice du  gestionnaire de crédit ».
            D’après nos investigations, les récriminations des membres du bataillon portent surtout sur leurs primes. Outre la sécurité propre de la primature, ce bataillon est en charge de la sécurité des hautes personnalités du pays et de ses invités de marque. Pour cela, ils perçoivent une prime mensuelle variable suivant le grade. Ainsi, un soldat touche 1 million de francs tandis qu’un colonel perçoit deux fois plus.
            La lettre dénonce donc une liste fictive, des militaires fantômes à travers lesquels le responsable se fait une fortune très conséquente. Résultat : de fortes rumeurs circulent à Mahazoarivo que le budget alloué aux primes serait épuisé en octobre prochain. En novembre et décembre, aucune prime ne serait donc plus distribuée. Or, l’année dernière, c’était déjà exactement le cas. C’est d’ailleurs à la suite du mécontentement dans les rangs qu’un audit a été diligenté. D’après nos sources, les résultats de l’audit ont été ficelés depuis février dernier.
             Apparemment, les membres du bataillon sont au courant du rapport d’inspection pour s’étonner que le Premier ministre n’a encore pris aucune mesure jusqu’à présent. « Bien au contraire, indiquent-ils, on a limogé un innocent qui n’a pas été promu colonel alors que le responsable a reçu son grade de colonel ».D’après nos sources, celui qu’on accuse de détournement est le directeur de sécurité à la Primature et l’officier limogé est son adjoint qui est le commandant de bataillon.
              Bref, le bataillon invite le locataire de Mahazoarivo de prendre les mesures qui s’imposent. « Nous sommes prêts à vous soutenir jusqu’au bout dans la justice et l’équité. Sinon, désolés, triplement désolés car nous allons prendre nos responsabilités et ne pouvions pas être tenus responsable de ce qui se passera ». Si ce n’est une menace au Premier ministre, c’est tout comme.
               Aucun ultimatum n’a été donné et on ne peut imaginer ce qui se passera effectivement si la menace vient à exécution. En attendant, cette affaire ne fera que renforcer l’image d’Omer Beriziky, celle d’un homme mou qui n’ose prendre les décisions qui s’imposent.
               Face à la grève des ministres de M. Ravalomanana, on ne l’a jamais entendu frapper sur la table. Peut-être veut-il être bien vu par tout le monde dans la perspective d’une éventuelle carrière politique à l’avenir, mais le résultat est là : il n’y a qu’à Madagascar qu’on trouve des ministres qui font la grève pendant des mois, ne réagissent que pour protéger des intérêts et continuent de vivre royalement sur le dos d’une population démunie. Pire : puisque le Premier ministre ne veut pas assurer l’intérim ou affecter ce rôle à un autre ministre, Joseph Randriamarisoa continue d’être le ministre des Eaux et Forêts en dépit de son limogeage. Son équipe continue ainsi de distribuer des permis pour couper et ramasser les bois de rose supposés déracinés par le dernier cyclone. Si son attitude n’est pas complice, comment peut-on le qualifier.
                 Dans cette affaire de détournement au BSP, nos sources indiquent que le limogeage de l’accusé aurait été déjà décidé en conseil des ministres. Le décret serait cependant en souffrance au niveau du Secrétaire général de la Présidence. S’agit-il d’une lenteur administrative ou d’une super-protection ? Les petits soldats ne veulent rien savoir. Dès la fin de l’audit et la remise des rapports, Omer Beriziky avait le pouvoir de suspendre le concerné. Pourquoi ne l’a-t-il pas fait ?

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