Thursday, July 05, 2012

Accord de pêche avec l'Europe : un marché de dupe

Accord de pêche avec l’Europe: Une grande braderie ...
Jeudi, 05 Juillet 2012 
Alors que les autorités se sont félicitées de la signature du nouvel accord de pêche avec l’Union européenne (UE), des chercheurs dénoncent des contreparties financières très infimes par rapport à ce qu’il devait être.
«  L’'Union européenne paie moins que ce qu'il avait fait, il y a deux décennies, tout en pêchant plus de poissons », rapporte notamment le site spécialisé « The Fish Site » en rapportant les résultats de recherche de l’université canadienne University of Bristish Columbia.
Composée de chercheurs issus de Madagascar, de l’Union européenne, du Canada et de la Banque mondiale, l’équipe constate que « depuis 1986, les quotas de l'UE pour la capture du poisson dans les eaux de Madagascar ont augmenté de 30 pour cent, tandis que ses frais d'accès ont diminué de 20 pour cent. En conséquence, le revenu annuel total pour Madagascar a diminué de près de 90 pour cent entre 1986 et 2010 ».
Des propositions seront proposées cette semaine dans la revue « Marine Policy » mais d’ores et déjà, l’auteur principal de l’étude, Frédéric Le Manach, estime que «les droits d'accès devraient être fondées sur la valeur marchande des poissons, et non sur un taux fixe». Actuellement, indique-t-on, les pays de l’Union européenne paient des droits équivalent à moins de 3 % de la valeur des captures avec une flotte fortement subventionnée créant ainsi des marges bénéficiaires élevées pour les entreprises privées alors que l’UE s’était engagée à canaliser le retour de ces bénéfices au pays.  "L'UE est en train de profiter injustement des ressources de l'un des pays les plus pauvres du monde," ajoute ainsi un des co-auteurs de l’étude, Rashid Sumaila.
Un autre membre de l’équipe estime, pour sa part, que la fixation des droits de pêche à 50 % du revenu brut est parfaitement possible. Cela permettra à Madagascar d’escompter 8,7 millions d’euros par an.
Simple coïncidence ou réaction à l’autosatisfaction européenne d’avoir renouvelé le gros lot, la publication de l’étude de l’université canadienne intervient le lendemain de la rencontre du Premier ministre Beriziky avec la commissaire européenne chargée de la pêche, Maria Damanaki, qui s’est réjouie de la signature récente de l’accord. Et pour cause !
Cette vente au rabais de nos richesses thonières qui, d’après un autre membre de l’équipe, « soulève de profondes questions éthiques auxquelles l’UE doit faire face », sera certainement tempérée par Omer Beriziky lui-même qui au retour de son voyage à Bruxelles, rappellera le but de son voyage, à savoir la reprise du dialogue politique en vue de la mise à disposition des 600 millions d’euros du 10 ème FED et, du déblocage immédiat des 100 millions d’euros promis à la suite de la signature de la feuille.
Il est vrai que l’Union européenne est le premier bailleur de fonds de Madagascar avec cette particularité inestimable : tous les financements accordés sont des subventions c’est-à-dire des dons non remboursables. Les seuls crédits européens à rembourser sont ceux de la Banque européenne d’investissements qui alloue des lignes de crédits pour des projets comme celui d’Ambatovy, par exemple.
Certes, la pêche thonière au nord de Madagascar a également des effets induits importants à travers le carénage des bateaux à la Secren ou la mise sur le marché local des thons hors normes.
Il n’empêche qu’on ne peut que s’aligner sur l’étude de l’équipe internationale de chercheurs. Car en matière d’exploitation des ressources d’un pays, il y a quand même un minimum à respecter à savoir la jouissance d’une partie importante des profits par la population locale. Or, ce ne serait pas le cas. Et, c’est vrai pour la pêche mais ce l’est aussi pour les ressources minières.
On ne peut, en effet, s’empêcher de faire le parallèle entre le 1,5 million d’euros de redevances pour les 13 000 tonnes de thons pêchés annuellement par les 96 bateaux français, espagnols et portugais dans nos eaux territoriales avec les 2 % de redevance fixées par l’Etat pour les sables ilménites, cobalt et nickel sortis de nos terres. Cela est d’abord la faute de nos dirigeants qui ont littéralement offert nos ressources naturelles aux étrangers. Que restera-t-il pour nos générations futures après cette grande braderie ?

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