Sunday, April 15, 2012

Madagascar: Touche pas à mon bois de rose

Réagissant par rapport à la décision du président de la transition de le limoger, Dr. Joseph Randriamiharisoa n’a pas bronché. Il a dit, apparemment calmement, que c’était prévisible et que le président de la transition ne pouvait pas faire autrement depuis que des mesures d’assainissement de la filière bois de rose avaient été mises en œuvre, notamment le trois Z (zéro stock, zéro circulation, zéro exportation) et la détermination manifestée par les veilles actives sur tout mouvement de bois de rose. Il a fait comprendre qu’il ne pouvait en être autrement car il était considéré comme le grain de sable qui empêche la machine à sous du bois de rose de tourner. « L’affaire de l’arrêté 074/2012 du 18 janvier 2012 et toutes les interprétations qu’on lui a donné, appuyé par une partie de la société civile, ayant induit par la suite une partie de la communauté internationale, ne sont qu’un prétexte pour m’écarter, car je dérange », martèle l’homme.

Joseph Randriamiharisoa explique que le déclic de ce limogeage a commencé quand l’étau s’est resserré sur le bateau qui a été surpris sur les côtes d’Antalaha et sur un autre bateau au large de Mananara, alors même que des cargaisons de bois de rose étaient en mouvement sur la terre ferme puis saisies par la Force mixte à Antanandavahely (à proximité de Cap Est). En d’autres termes, selon Joseph Randriamiharisoa, la traque des éléments de la Force mixte, qui, sur ses ordres, ont arraisonné les navires et saisi les quelque 3000 rondins de bois de rose, n’a pas du tout plu aux trafiquants et à leurs complices ; d’où le limogeage nocturne. D’ailleurs, précise-t-il, les constats établis après visites de ces navires ont démontré qu’ils devaient procéder au transbordement du bois de rose à destination de la Chine. Le déplacement médiatisé de la délégation de la mouvance Zafy au tribunal pour relancer la plainte contre le président de la transition n’a pas été non plus pour arranger le sort du Dr. Joseph Randriamiharisoa.

Réaction du professeur Zafy


Le Dr. Joseph Randriamiharisoa, a été donc limogé en raison de « violation grave et flagrante à l’endroit du décret n°2010/141 du 24 mars 2010 qui interdit la coupe, l’exploitation et l’exportation de bois de rose et bois d’ébène à Madagascar. Malgré les multiples rappels à l’ordre qui ont été évoqués en Conseil des ministres, ces actes illégaux ont été pris par le ministre en violation du principe de la hiérarchie des normes et créent ainsi une source de désordre. Cela constitue une faute grave menaçant les actions et la cohésion du gouvernement de transition d’union nationale, ce qui est d’autant plus intolérable dans la mesure où nous faisons tous les efforts pour renforcer l’état de droit dans notre pays ».

Ce sont les motifs officiels de l’abrogation de sa nomination en tant que ministre. La décision de le limoger a été officialisée par le président de la transition le 6 avril dernier si l’on s’en réfère à la lettre du président de la transition adressée au Premier ministre. Dans cette lettre, le président de la transition demande au Premier ministre, d’abroger le décret nommant Joseph Randriamiharisoa, ministre, d’une part et d’autre part, de faire le nécessaire auprès de la mouvance Zafy pour obtenir une liste de noms pour que le président de la transition puisse choisir et nommer celui ou celle qui succèdera au Dr. Joseph, ceci conformément à l’article 6 de la feuille de route qui indique qu’en cas de révocation d’un membre du gouvernement, il sera remplacé par un autre membre de son groupe de provenance politique selon les mêmes règles de procédure de nomination.

En réponse à cette demande, le Pr. Zafy fait comprendre au Premier ministre Omer Beriziky, qu’« il faut remplacer en premier Monsieur Andry Nirina Rajoelina qui a transgressé les dispositions de la Feuille de route dès la nomination des membres du Gouvernement… », parce que les ministres ont été recrutés par le président de la transition et « intégrés dans son quota suivant les prérogatives présidentielles ». Autrement dit, le Pr. Zafy persiste et signe qu’il n’a rien à voir avec la nomination du Dr. Joseph Randriamiharisoa mais qu’il y a eu usurpation de titre ou du moins abus lorsqu’on dit que ces ministres sont de la mouvance Zafy. En tout cas, l’ancien président estime que le président de transition doit plutôt « présenter des excuses au Dr. Joseph pour l’avoir induit en erreur en l’intégrant dans le gouvernement sur un faux quota (sic) ».

Quant au motif de remplacement et qui a trait au bois de rose, le Pr. Zafy réitère ses accusations contre Andry Rajoelina et consorts. Pour une fois, ajoute-t-il, le président de la transition a raison quand il dit vouloir agir avec sévérité, mais il faut qu’il l’applique contre sa personne car il se comporte comme étant au dessous des lois. Et le Pr. Zafy de citer pêle-mêle les affaires pour lesquelles il l’accuse : bois de rose, permis miniers, trafic d’or, société Kraoma, Alouettes II, et les comptes de dépôts… Zafy Albert interpelle alors la communauté internationale, notamment la SADC, « à saisir tous les comptes bancaires des réseaux mafieux et criminels liées au dépeçage du pays ».

Mieux, il invite le Premier ministre à saisir la SADC pour clarifier les rôles et les pouvoirs entre la Primature et la Présidence et pour dénoncer la « pratique de chef de bande » afin de remettre la transition sur les bons rails. Du pain sur la planche pour le Premier ministre qui doit donc assurer l’intérim de ce ministère très sensible car finalement la mouvance Zafy ne lui fournira pas de nom mais en plus, il doit prendre en main la transition si l’on a bien compris ce que réclame la mouvance qui l’avait proposé.

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