Tuesday, February 28, 2012

Des ministres et chefs de Région à Manakara: Refus buté et bruyantes huées de la population !

Evidemment, ils y sont allés samedi dernier pour essayer de régler l’affaire Mainlands, qui a défrayé la chronique ces dernières semaines. Ils, ce sont la ministre Daniela Randrianfeno, en charge des Mines, et celui des Relations avec les Institutions, Manantsoa Victor, plus les chefs des Régions d’Analanjirofo, Saina Michel, d’Atsimo Atsinanana, le colonel Bellone, et évidemment celui de Vatovavy Fitovinany, Martial Rakamisilahy.
Manakara a connu ce samedi-là, selon une correspondante particulière sur place, une effervescence rare. La rencontre entre la population et les deux membres du gouvernement a eu lieu au Sidi Hôtel, lequel était plein comme un œuf, et débordait largement au dehors. La société chinoise Mainlands Mining et son projet d’extraction d’ilménite et de zircon étaient sur toutes les lèvres. Son DG, un Chinois évidemment, était présent dans la salle. Lors de la présentation des illustres visiteurs, l’applaudimètre était plutôt réticent. Au nom de Sileny Alban, président de la délégation spéciale à la commune et qui soutient la population dans son « combat » contre Mainlands, il s’est quelque peu emballé. La ministre des Mines a expliqué que la délégation dont elle faisait partie était venue s’enquérir des réalités concernant l’implantation de la société dans la zone de Manakara. L’autre membre du gouvernement, Manantsoa Victor, a apporté quelques explications, relayé en cela par un technicien qui s’est servi d’un vidéo projecteur, afin de convaincre les Manakarois que la ville n’aurait que bienfaits de la part de Mainlands Mining. Mais, les hurlements ont rempli la salle : « Nous n’en voulons pas ! » Manantsoa Victor a, lui, tenté un grand coup : « Si on divisait les bénéfices que tireraient les habitants de Manakara de l’implantation de cette usine, vous aurez chacun un million de francs chacun, y compris les nouveaux nés ! » Mais la population est demeurée imperturbable : « Nous n’en voulons pas, nous préférons consommer nos fruits à pain ! » Non à Mainlands : l’air à la mode à Manakara samedi dernier, hurlé sur tous les tons. Le DG de la société maudite a lui aussi reçu sa (sur)dose de huées, suivies de « Miboeza ! » (Allez-vous en). Seul Sileny Alban avait le pouvoir de calmer la foule. Des accusations ont été publiquement lancées contre le chef de la gendarmerie locale, et même contre le président de la transition, qui auraient respectivement terrorisé et trompé la population.
La phobie de Manakara à l’encontre de Mainlands Mining a trouvé ses sources dans les maladresses sinon le mépris que cette société chinoise a fait montre vis-à-vis de la population dès les débuts de son implantation. En effet, ils auraient sondé partout où il existait du sable, sans l’accord des occupants. Terrains, champs de culture, lieux habités : tout y passait. Le pire était que, chaque fois que les paysans se plaignaient aux autorités, ces dernières penchaient du côté des Chinois. Le chef de Région avait affirmé que ces derniers n’en étaient qu’au stade des études. Des espions envoyés par la population rendaient pourtant compte que la société était au contraire en pleine exploitation. Il y a deux semaines, trois roitelets ont été arrêtés pour avoir été du côté des contestataires. Par ailleurs, trois faux roitelets ont déclaré sur TVM et RNM à Antananarivo, avoir été envoyés par la population de Manakara pour annoncer que Mainlands était la bienvenue. De retour à Manakara, ils ont été punis par la collectivité d’une amende de 300 000 Ariary, plus un zébu, pour avoir usurpé le nom du Fokonolona. En réaction, le chef de Région aurait dépêché des gendarmes pour appréhender trois dirigeants du Fokonolona. Saina Michel a voulu témoigner que Mainlands est d’une grande utilité dans sa Région, du côté de Fénérive-Est, mais on lui a imposé le silence. Bellone aussi, mais on lui a alors suggéré d’implanter Mainlands chez lui à Farafangana. Un notable de Vohipeno avait résumé le sentiment général : « l’anguille est délicieuse, mais on ne va pas se servir de sa langue pour l’appâter ». Ou, en clair, il est bon d’avoir de l’argent, mais on ne va pas vendre la terre des ancêtres pour autant.
L’ilménite et le zircon seraient-ils radioactifs ? En tout cas, la population de là-bas semble le craindre. La destruction accélérée de l’environnement effraie également. Le fait que Mainlands Mining ait déjà versé à la Région un chèque de vingt millions d’Ariary, à titre d’avance de location des entrepôts du port de Manakara, n’est pas pour simplifier les choses. La population, elle, n’en a cure, et promet de manifester tous les samedis jusqu’à ce que la société chinoise déguerpisse de chez elle.

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