Tuesday, January 24, 2012

L'éruption solaire qui touche la Terre est-elle dangereuse ?

Cette image, fournie par la NASA, a été prise dimanche 22 janvier, et montre l'éruption dans l'hémisphère Nord du soleil.


Certes, l'éruption solaire de la nuit du dimanche 22 au lundi 23 janvier ne rivalisera pas avec celle de 1989, qui avait provoqué au Québec et dans le nord-est des Etats-Unis une panne électrique générale de 9 heures. Ni avec celle de 1859, la plus violente jamais enregistrée, qui avait généré des surtensions sur le réseau télégraphique et des incendies en Amérique du Nord. Mais c'est tout de même "une belle bête", estime Ludwig Klein, astronome au Laboratoire d'études spatiales et d'instrumentation en astrophysique de l'Observatoire de Paris. Le flux de protons dans l'espace interplanétaire est particulièrement intense : c'est le plus élevé depuis 2005.

Selon Doug Biesecker, physicien à l'Administration nationale des océans et de l'atmosphère (NOAA) des Etats-Unis, l'éruption a projeté un nuage de plasma à la vitesse de 6,4 millions de km/h. La tempête géomagnétique induite est classée au niveau 3 sur une échelle de 5.

RÉVEIL DU SOLEIL

Notre astre solaire a ses colères qui suivent des cycles de onze ans entre deux pics d'activité. Il émerge actuellement d'un long sommeil qui a atteint son niveau le plus profond entre 2008 et 2010. Il atteindra le paroxysme de son agitation en 2013, prédisent les astronomes. Durant ces périodes d'effervescence, de nombreuses taches viennent ternir par endroit – et, paradoxalement, rendre globalement plus brillante – sa surface. Ces taches sont la manifestation d'un champ magnétique très agité, qui remonte par endroits des tréfonds de l'astre et atteint sa surface, formant alors une zone sombre à l'activité intense.

Le champ magnétique du Soleil s'ancre dans un gaz brûlant à des températures d'environ 6 000 degrés, et qui évolue dans un mouvement perpétuel comparable à une ébullition. Il est parcouru de particules électriquement chargées, protons ou électrons. L'énergie qui s'y emmagasine peut brusquement se libérer dans une explosion, qui crée un gaz encore plus brûlant, pouvant atteindre une dizaine de millions de degrés. C'est ce qui s'est passé lundi, explique Ludwig Klein.

Est alors éjectée dans l'espace une partie de la masse solaire accompagnée d'un champ magnétique propre. Celui-ci arrive en un jour ou deux sur Terre, c'est-à-dire aux alentours du mardi 24 janvier.

ORAGES MAGNÉTIQUES ET MARCHÉS FINANCIERS

Fort heureusement, les Terriens sont protégés de ces bombardements par une double enveloppe : la magnétosphère et l'atmosphère. Selon Ludwig Klein, les détecteurs de particules au sol n'ont, pour le moment, mesuré aucune activité anormale. Toutefois, des particules énergétiques solaires peuvent s'introduire dans la région des pôles. Le champ magnétique de l'astre, en se couplant avec son homologue terrestre, provoque alors des instabilités qui formeront des aurores boréales.

Aurore boréale au-dessus de Stockholm, en Suède.



Quant aux particules solaires, elles peuvent avoir des conséquences autrement plus fâcheuses. Notamment en déréglant les systèmes informatiques des satellites – et donc en perturbant potentiellement les systèmes de communication qui en dépendent. "On a déjà perdu plusieurs satellites de cette façon, qui ne parvenaient plus à bien interpréter leurs commandes", souligne Ludwig Klein.

Par ailleurs, la ionosphère, à environ 80 kilomètres au-dessus de nos têtes et utilisée pour les transmissions radio, peut également être touchée. Des problèmes de communication peuvent alors survenir sur des lignes aériennes proches des pôles. C'est arrivé en 2005, quand des avions volant dans la région du pôle Sud ont dû être redirigés, se souvient l'astrophysicien.

L'influence du vent solaire sur l'environnement terrestre



Même dans ce bas-monde, les tempêtes géomagnétiques peuvent avoir des effets insoupçonnés. En juin, l'Organisation pour la coopération et le développement économiques notait que ce type d'aléa météorologique, consécutif à une éruption solaire, faisait partie des quelques risques majeurs susceptibles de perturber l'économie mondiale. De plus en plus intégré, le système économique – et notamment les marchés financiers – reposent en effet sur les technologies de l'information et de la communication.


Enfin, s'il n'y a à peu près aucun risque d'être criblé de protons tant qu'on reste sur le plancher des vaches, il n'en est pas de même pour les personnes voyageant en avion dans des régions polaires, et, a fortiori, pour les quelques humains qui évoluent hors du cocon atmosphérique. Il en est ainsi du personnel de la Station spatiale internationale, à près de 500 kilomètres de la Terre. Bien qu'ils soient toujours sous la protection de la magnétosphère, qui s'étend jusqu'à 40 000 km autour de la Terre, ils subissent de fortes radiations.

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