Friday, December 09, 2011

Mutinerie de la police à Toliara: Un magistrat tué, un autre séquestré PDF Imprimer Envoyer La Police nationale en bloc s’est mutinée hier à Toliar


La Police nationale en bloc s’est mutinée hier à Toliara, provoquant de graves incidents en ville. A la tombée de la nuit, la situation n’était pas encore sous contrôle, et à Antananarivo, les principaux responsables de l’ordre public ont envisagé sérieusement d’y décréter l’état de siège, ou tout au moins le couvre-feu.

Les faits : un agent de police a été condamné à cinq ans de prison ferme pour avoir loué son arme à des bandits, et a été incarcéré à la prison de Toliara. Ce qui a beaucoup contrarié les fonctionnaires de Police de la ville qui ont pris leurs armes pour protester contre la décision de justice et, apparemment, pour libérer leur collègue détenu. Certains ont assiégé la prison et ont tiré en l’air, d’abord pour manifester leur fureur, ensuite peut-être pour obtenir l’élargissement de leur camarade. Les gardes pénitentiaires ne se sont pas laissé intimider et ont également tiré en l’air.

Des contacts, en tout cas, ont été engagés entre assaillants et assiégés, ces derniers s’étant montrés fermes sur le point suivant : l’agent de Police y a été interné suite à une décision de justice, et ne serait libéré que suite à une autre décision de justice.

Etait-ce pour obtenir ce document ou pour se venger d’un verdict à eux défavorables ? En tout cas, des policiers armés ont fait irruption au palais de Justice et en ont tiré le substitut du procureur. Celui-ci, nommé Rehava Michel (un natif de Tuléar), a été ligoté, jeté dans le coffre d’un taxi et convoyé jusqu’au commissariat de Police. Ce magistrat a été sévèrement tabassé et est mort sous les coups.

Un autre magistrat, juge d’instruction, a également été emmené et séquestré. Hier soir, son sort, encore inconnu, a suscité les plus vives inquiétudes dans sa corporation. En tout cas, même en début de soirée, la tension n’était pas encore tombée dans la ville secouée de temps à autre par des rafales ou des tirs d’armes automatiques. Pas de « zomà magnifique » hier car la population effrayée s’est barricadée chez elle…

On s’étonne, en tout cas, de la naissance et de l’extension rapide de cet acte de rébellion. Notamment, car hier, le ministre de la Sécurité intérieure et les principaux responsables de la Police nationale se trouvaient à Toliara pour la célébration du 50ème anniversaire de la Police. En fait, dit-on, l’incident n’était pas étranger à la genèse des événements, en raison d’abord d’un important rassemblement de fonctionnaires de Police de Toliara et d’autres villes de l’île. En raison aussi de atmosphère de fête et de la consommation de boissons indissociables de ce genre de réjouissances. Mais tous les témoins sont fermes : la fronde n’était pas le seul fait des subalternes car des gradés ont été aperçus en train de diriger les opérations.

En tout cas, rappelons que la principale mutinerie des corps en uniforme fut le fait de la Police en 1975. La caserne du Groupe Mobile de la Police, à Antanimora, était entrée en rébellion contre le régime, le mouvement s’étant terminé par l’assassinat du colonel Richard Ratsimandrava, chef d’Etat et chef du gouvernement. Cette fronde retentissante a marqué les esprits dans la Police et laissé son empreinte dans la culture de ce corps. Pour cette raison, la Police est parfois agitée par des actes de désobéissance tumultueux, comme ces derniers mois le refus d’affectation manifesté par le commissaire Jean Brunel Razaftsiandraofana, chef de la Police de l’Air à l’aéroport d’Ivato, ou par le commissaire Fidèle Rakotonjanahary du commissariat de police de Mahamasina. Ce dernier a même pris les armes et s’est présenté devant la presse avec une Kalachnikov, entraînant dans la rébellion tous ses subordonnés.

Ces événements de Toliara, qui surviennent dans une conjoncture politique délicate, sont-ils fortuits ? Ce régime, qui est prompt à crier au complot, n’y croit certainement pas. En haut lieu, on médite certainement sur la question suivante : ces policiers de Toliara ont la gâchette bien facile, mais qui est-ce qui tire… les ficelles ?

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