Friday, September 23, 2011

Faut-il recapitaliser les banques européennes?

La Commission européenne juge qu'une recapitalisation des banques européennes est peut-être nécessaire, rejoignant ainsi la position de la directrice générale du FMI.


Recapitalisation des banques ou non? Le débat autour de cette question s'intensifie alors que la pression augmente sur fond de crise de la dette en zone euro.

La dernière intervention en date sur le sujet provient de la Commission européenne qui semble pencher pour cette solution. Pour le commissaire européen chargé de la Concurrence, Joaquin Almunia, cette recapitalisation sera peut-être nécessaire. "Malheureusement, avec l'aggravation de la crise des dettes souveraines, de nouvelles banques auront peut-être besoin d'être recapitalisées" en plus des neuf qui n'ont pas réussi les tests de résistance des banques effectués en juillet, a-t-il dit mardi 20 septembre.

Dans ces circonstances, "je vais proposer cette année de prolonger les règles autorisant les aides d'Etat" mises en place en 2008-2009, "afin de permettre aux gouvernements de continuer à aider publiquement leurs banques au-delà de 2011", a-t-il annoncé.

Ce recours au financement public doit intervenir "en dernier recours", a-t-il mis en garde, encourageant les banques à se "financer sur les marchés et à prendre toutes les mesures possibles, comme la vente de filiales et la limitation des dividendes, avant de se tourner vers le soutien public".

"J'aurais préféré qu'on revienne plus tôt aux règles normales" de concurrence, "et c'était mon intention jusqu'à cet été. Mais la situation à laquelle nous sommes confrontés plaide pour une prolongation du régime existant" permettant aux Etats d'aider leurs banques, a-t-il expliqué.

Haro sur Christine Lagarde

Lundi, c'était au tour du gouverneur de la Banque centrale finlandaise de se prononcer pour cette solution. "L'outil le plus efficace pour restaurer la confiance dans le système financier est la recapitalisation des banques. C'est avant tout la tâche des actionnaires", a déclaré Erkki Liikanen devant la presse à Helsinki.

Le ministre français de l'Economie avait pourtant réaffirmé dimanche sa confiance dans la situation des banques européennes. "Cela veut dire qu'à la question +y-a-t-il des problèmes de liquidités?+, la réponse est non et à la question +y-a-t-il un problème de solvabilité?+, la réponse est non. Nous ne sommes pas inquiets", a martelé le ministre.

La directrice du FMI avait lancé maladroitement le débat, début septembre, et ouvert la polémique en appelant l'Europe à recapitaliser ses banques. Les dirigeants européens avaient alors fait valoir la bonne santé des grands établissements du continent, sans totalement convaincre les marchés.

La Bourse de Paris perdait plus de 5 % à la mi-journée plombée par les valeurs bancaires. Le scénario d’une recapitalisation des banques européennes se précise. Bruxelles estime à présent que plus d’une vingtaine d’établissements auront besoin d’une injection d’argent frais.

Le commissaire européen aux services financiers, Michel Barnier, a souligné jeudi dans une interview au quotidien français Le Figaro que, même si « l’époque s’achève où l’on devait renflouer les banques grâce aux contribuables », on ne « peut pas exclure que certaines auront besoin de l’aide de l’Etat ».

Après les stress tests de juillet

Ces propos font écho à ceux tenus mardi par son collègue chargé de la concurrence, Joaquin Almunia. Il avait expliqué qu’avec « l’aggravation de la crise des dettes souveraines, de nouvelles banques auront peut-être besoin d’être recapitalisées », en plus des neuf qui n’ont pas réussi les tests de résistance effectués en juillet.

« Seize autres ont passé l’épreuve de justesse et doivent aussi être recapitalisées », a affirmé M. Barnier, qui n’a pas cité d’établissement.

Les banques françaises peuvent-elles tenir ?

Parmi ces 16 banques, sept sont espagnoles, deux portugaises, deux grecques, deux allemandes, une Italienne, une Slovène et une Chypriote. Les plus importantes sont la Banco Popolare italienne, la portugaise Millennium BCP (Banco Comercial Português) et les Espagnoles Sabadell, Banco Popular et Bankinter.

M. Barnier n’a pas évoqué la situation des banques françaises, attaquées depuis plusieurs jours sur les marchés, certains investisseurs estimant qu’elles sont particulièrement exposées à la dette publique de pays en difficulté et devraient être recapitalisées.

L’Italie dans la tourmente

L’un des deux cogérants du très influent fonds américain Pimco, Mohamed El-Erian, a pointé jeudi « les signes d’une panique des investisseurs institutionnels envers les banques françaises », dont la fragilité risque, selon lui, de précipiter l’Europe dans la récession.

Quant aux banques italiennes, qui ont vu leur cours de Bourse s’effondrer ces derniers mois, elles ont subi un nouveau coup dur mercredi lorsque Standard and Poor’s a abaissé la note de sept d’entre elles.

200 milliards d’euros de perte

Le Fonds monétaire international (FMI) a appelé mercredi la zone euro à utiliser son Fonds européen de stabilité financière (FESF) pour recapitaliser les banques les plus fragiles et estimé les pertes endurées par le secteur à 200 milliards d’euros.

Une analyse partagée par le Comité européen des risques systémiques (CERS), qui a appelé mercredi les Européens à « coordonner leurs efforts pour renforcer le capital des banques », y compris en se portant garant en dernier ressort et en faisant appel, si nécessaire, au FESF.

Contagion = instabilité financière

Selon lui, « le degré élevé d’interdépendance dans le système financier européen a conduit à une augmentation rapide du risque de contagion. Cela met en péril la stabilité financière dans l’Union européenne entière ».

M. Almunia propose de prolonger les règles mises en place en 2008-2009, après la faillite de Lehman Brothers, pour que les gouvernements puissent continuer à aider publiquement leurs banques au-delà de 2011.

Mais il a insisté sur le fait qu’un financement public ne devrait intervenir qu’« en dernier recours ».

Que signifie recapitaliser?: Recapitalisation veut normalement dire ajouts de capitaux propres dans l'entreprise car elle serait en manque (elle procède alors à une augmentation de capital pour rembourser tout ou partie de ses dettes).

Le terme est cependant dévoyé avec le développement des LBO (Leveraged Buy-Out) pour qui recapitalisation veut dire exactement l'inverse, c'est à dire retraits de capitaux propres financés par un accroissement de l'endettement. Une recapitalisation est alors une opération dans laquelle une entreprise qui s'était beaucoup endettée il y a quelques temps, par exemple dans le cadre d'un LBO, et qui a pu grâce à l'importance des cash flows dégagés rembourser une bonne partie de sa dette décide de se réendetter. A cet effet, elle verse par exemple un dividende extraordinaire à ses actionnaires financé par un nouvel emprunt bancaire qui en général remplace aussi le précédent.

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