Friday, June 17, 2011

Bras de fer Etat/pétroliers: L’Etat achemine l’économie vers l’effondrement


Vendredi, 17 Juin 2011 05:35
Enquête à la police économique pour 6h durant avant-hier pour le directeur général intérimaire de Shell. Hier, même scénario pour d’autres directeurs généraux de compagnies pétrolières. Le ministère des Mines et des Hydrocarbures a annoncé la couleur mardi : il a promis une enquête pour déterminer l’origine de la perturbation de l’approvisionnement des stations-service après le week-end de la Pentecôte. Des experts du secteur réagissent : « Est-ce la solution du comité interministériel composé de 7 ministres pour résoudre les problèmes d’approvisionnement ? Depuis des mois, ce comité n’a trouvé aucune solution à même d’aller dans ce sens. Avec cette enquête et ces pressions contre les pétroliers et surtout avec les ventes à pertes qu’ils doivent subir, il est fort probable que ces compagnies iront tout droit devant un arbitrage international. La situation actuelle affecte leur fond de commerce ». A leurs yeux, l’évolution négative du bras de fer entre les deux parties pollue gravement le climat des affaires à Madagascar et pourrait même déteindre sur la recherche de la reconnaissance internationale du régime en place. Pire, ils avancent que l’Etat achemine l’économie vers l’effondrement.

Pour l’heure, le stock est à un niveau de 36 à 71 jours selon les produits. Mais si la situation actuelle perdure, il n’y aura plus une goutte de carburant bientôt. Les banques refusent de signer les lettres de crédit des compagnies. Or, ces documents sont indispensables pour financer les importations. Nos sources avancent que les compagnies ne sont plus solvables à force de vendre à perte depuis des mois. D’où le refus des banques. Notons que la vente à perte est interdite par la loi mais l’Etat l’autorise indirectement en décidant de fixer lui-même et de faire stagner les prix à la pompe depuis fin février. Dans une lettre des compagnies adressée en haut lieu pour signaler la gravité de la situation courant mai, les pétroliers enregistrent des pertes approchant les 300 Ar/litre sur certains produits. Nos interlocuteurs ne comprennent plus la situation : « Les autorités regardent sans rien faire la prolifération du marché noir où le gasoil s’achète à 4 000 Ar/litre pour 5 000 Ar pour l’essence. Pourquoi ne pas accorder aux compagnies la hausse nécessaire au lieu de laisser faire le marché noir, les prix y sont 1 000 Ar plus chers qu’à la pompe ? Pourquoi favoriser ce genre de marché et étrangler les pétroliers qui ont repris la Solima en y investissant plusieurs dizaines de millions de dollars pour faire fonctionner au mieux le secteur et créer des emplois ? ».



Des gros arriérés d’entreprises d’Etat

Pour envenimer la situation, une injonction de l’Etat a forcé l’ouverture du dépôt d’Alarobia dans la capitale pour l’approvisionnement de stations-service le mercredi 15 juin. Les documents y afférents ne respectent pas les procédures exigées dont les normes de sécurité, la nécessité d’examiner la solvabilité ou non des gérants… En effet, certains gérants sont au bord de la faillite ou ont démissionné à cause de la stagnation des prix à la pompe et donc de l’incapacité des pétroliers de les rémunérer normalement. Avec la distribution anarchique de mercredi dernier, personne ne sait qui paiera les factures des gérants non solvables mais dont la station a été abondamment approvisionnée. Quant aux pétroliers, ils ne sont plus en mesure de payer les taxes douanières, alors qu’ils contribuent grandement à alimenter les recettes fiscales. Des sources proches du comité interministériel avancent que certains membres de ce comité roulent pour une augmentation progressive des prix à la pompe pour éviter de subventionner les produits pétroliers et d’assécher la caisse de l’Etat.

En attendant, les pétroliers risquent aussi de ne plus pouvoir payer leurs fournisseurs bientôt. Ils n’arrivent pourtant pas à recouvrer les gros arriérés d’entreprises d’Etat comme ceux de la Jirama et d’Air Madagascar. A la longue donc, ces entreprises tout comme l’économie dans son ensemble seront victimes de l’absence de solutions pérennes pour résoudre les problèmes du marché pétrolier. Depuis des mois, des rumeurs circulent sur l’intention de l’Etat d’importer lui-même des produits pétroliers. Soit. Mais avec une réserve en devises en dessous des 800 millions de dollars, un tel projet ne pourra pas tenir la route. Rappelons que la facture pétrolière pour les 4 premiers mois de l’année a dépassé les 200 millions de dollars. Il n’est pourtant pas possible de trouver du carburant bon marché avec les cours mondiaux flirtant toujours avec les 100 dollars/baril pour le pétrole brut. Nos interlocuteurs avancent : « Si les pétroliers coulent et ils sont actuellement proches de cette situation, l’économie coulera aussi. Même les avoirs des banques ne réussiront pas à redresser la situation ».

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