Friday, January 21, 2011

Baby Doc voulait tout simplement récupérer son argent resté en Suisse

Jean-Claude Duvalier, l'ancien président haïtien, serait revenu en Haïti après vingt-cinq ans d'exil en France non pas pour tenter de reconquérir le pouvoir, mais pour pouvoir récupérer quelque 6 millions de dollars bloqués en Suisse, selon un article publié jeudi 20 janvier par le New York Times.

Officiellement, "Baby Doc", inculpé mardi de corruption et de détournements de fonds, n'a toujours pas expliqué les raisons de son surprenant retour au pays, dimanche dernier. Dans cet article du quotidien américain, la journaliste Ginger Thompson écarte l'hypothèse d'une tentative de retour au pouvoir de M. Duvalier et avance une explication inédite.

"Le retour risqué de M. Duvalier chez lui pourrait avoir été motivé par une autre raison : l'argent", écrit-elle. "Bien que M. Duvalier ait été pendant longtemps accusé d'avoir pillé 300 millions de dollars en Haïti avant de s'enfuir, il y a près de vingt-cinq ans, ses avocats et amis ont toujours assuré que tout cet argent avait été gaspillé par un train de vie fastueux et des achats de bijoux, châteaux et voitures de luxe ainsi que par le divorce très coûteux d'avec son ex-femme", poursuit-elle.

6 MILLIONS DE DOLLARS BLOQUÉS EN SUISSE

Or, explique-t-elle, il resterait encore 6 millions de dollars bloqués sur un compte en Suisse, et que M. Duvalier voudrait bien récupérer. Et l'explication donnée par un de ses avocats, Gervais Charles, selon laquelle Baby Doc voudrait récupérer cet argent "simplement pour pouvoir le donner à la Croix-Rouge" ne semble pas convaincre.

En 2010, "quelques heures seulement avant le tremblement de terre", la Suisse avait estimé qu'au moins 4,6 millions de dollars pourraient être rendus aux Duvalier, ce qui avait alors provoqué un tollé.

Les autorités suisses avaient alors réagi en adoptant ce qui fut surnommé la "loi Duvalier", et qui permettrait aux pays ayant été spoliés par des dictateurs de pouvoir récupérer plus facilement ces bien mal acquis. Mais cette loi ne prendra effet qu'au 1er février et, jusqu'à ce jour, les Etats qui déposent des plaintes pour réclamer de l'argent volé auprès de la Suisse doivent encore démontrer qu'ils ont commencé une enquête sur le voleur présumé avant que des fonds puissent être rendus.

"C'ÉTAIT UN PARI, TOUT SIMPLEMENT"

"Donc, démontre Mme Thompson, si M. Duvalier avait pu se glisser dans le pays et en repartir en toute tranquillité, sans incident, comme il avait originellement prévu de le faire, il aurait pu arguer que Haïti n'ayant pas engagé de poursuites judiciaires, cet argent était le sien."

Le calcul de M. Duvalier était donc que Haïti se trouve actuellement dans un état de faiblesse tel, notamment administrative, qu'il lui était impossible d'engager des poursuites contre lui.

Selon un analyste proche du gouvernement interrogé par la journaliste et qui a tenu à garder l'anonymat, "c'était un pari, tout simplement". "Il a parié parce qu'il n'a plus d'argent et que sa santé est déclinante, qu'avait-il à y perdre ?"
Le Monde.fr

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