Wednesday, January 28, 2009

Vu dans courrierinternational.com

Un maire qui dénonce une "dictature" dans son pays et qui appelle à une grève générale, ce n'est rien d'autre que de la désobéissance civile. C'est à Madagascar que cela se passe, et, comme il fallait s ‘y attendre, la journée a été chaude, lundi 26 janvier, à Antananarivo, la capitale, où les partisans du jeune maire Andry Rajoelina se sont tristement illustrés en commettant de nombreux pillages un peu partout dans la ville. C'est ce genre de situation qu'aime la lie du peuple. Conséquence de cette descente dans la rue : des dizaines de personnes auraient trouvé la mort. Mais s'il y a des gens qui doivent une fière chandelle à Rajoelina, ce sont les détenus de la prison nationale d'Antanimora, qui se sont tous évadés dans la soirée.

Le 27 janvier, Rajoelina a évoqué, dans un entretien télévisé, la souffrance du peuple, la liberté d'expression et un avion que le président Marc Ravalomanana aurait acheté 60 millions de dollars. Le maire d'Antananarivo, dit-on, entretient des rapports tendus avec le régime depuis son élection à la mairie, en décembre 2007, comme candidat indépendant. Le bras de fer entre les deux hommes se serait exacerbé depuis la fermeture par le gouvernement, le 13 décembre 2008, de sa télévision privée, Viva TV, après la diffusion sur cette chaîne d'une interview de l'ex-président Didier Ratsiraka. On peut comprendre que Rajoelina ne soit pas content que sa télé soit muette à cause des autorités ou que sur l'île la démocratie soit de façade, mais ce n'est vraiment pas une raison pour appeler la population à la révolte. C'était triste de voir des émeutiers courir, certains avec des chaises, des câbles ou des sacs de sucre sur la tête, d'autres avec des sacs de ciment sur les épaules. Les pillards n'ont rien laissé sur leur chemin, et le président malgache, qui est aussi un homme d'affaires, a même été victime des vols. Pire, les locaux de la radio nationale ont été saccagés et étaient en feu.

Si ce n'est pas de la préméditation, ça y ressemble fort. La démocratie, ce n'est pas le désordre. Elle exige un minimum de responsabilité. Un responsable peut-il tout se permettre ? Décidément, ce Rajoelina a du culot. Morceaux choisis de cette bravade : "Le pouvoir appartient au peuple, il peut l'accaparer. Partout dans le monde, aucune force militaire n'a réussi à vaincre la force de la population. Il y a beaucoup trop de prisonniers politiques, et, quand je serai au pouvoir, ils seront tous libérés, sauf les assassins." Comme on le voit, le célèbre maire d'Antananarivo veut changer les choses, et il compte certainement sur la rue pour chasser Marc Ravalomanana et ses hommes du pouvoir. Mais oublie-t-il qu'il a atterri à la mairie grâce aux urnes ? En Afrique, aucun régime n'est parfait, et si on aspire à bousculer l'ordre établi, il n'y a pas de meilleure façon que l'alternance. Les élections sont le seul moyen pour parvenir au pouvoir. Rajoelina le sait mieux que quiconque et ce n'est donc pas bon, sous des dehors fallacieux, de passer par la rue pour être au faîte des honneurs.

C'est ce même peuple qui a élu Ravalomanana, et il doit attendre la fin de son mandat pour le sanctionner s'il estime que le pain manque et que la liberté est confisquée. L'anarchie est le faible des politiciens véreux, et c'est dommage que des gens n'aient pas compris qu'ils sont manipulés pour des intérêts égoïstes.

Justin Daboné
L'Observateur Paalga

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