Wednesday, January 28, 2009

Et aussi dans le journal Le Monde du 28/01/09

Le bilan des émeutes et des pillages qui ont secoué Antananarivo depuis lundi 26 janvier, en marge des manifestations contre le président Marc Ravalomanana, un homme d'affaires prospère accusé de tendances autocratiques, s'établit à au moins 34 morts. Au lendemain d'un premier bilan faisant état de deux morts, celui-ci a été réévalué à la hausse après la découverte, mardi, de quelque trente corps calcinés dans les décombres d'une galerie marchande.
Dans ce contexte, le chef de l'Etat a lancé un appel "à l'unité nationale et au dialogue" en direction de l'opposition et de son chef de file - le jeune maire de la capitale, Andry Rajoelina. "J'appelle la communauté internationale, ainsi que les églises à tout faire pour que les deux parties se rapprochent", a-t-il déclaré. "Si on y arrive, je promets que les troubles s'arrêteront rapidement", a ajouté le chef de l'Etat. "Il n'y aura pas de réunion ou de dialogue tant que les militaires qui ont tué (...) n'auront pas rendu des comptes", a répliqué M. Rajoelina, qui n'en a pas moins annulé toute nouvelle manifestation.
L'appel au dialogue du chef de l'Etat a conduit les Occidentaux à tenter une mission de médiation. A l'issue d'une réunion de diplomates, mardi matin à l'ambassade d'Allemagne à Antananarivo, ils ont proposé d'organiser "une rencontre en terrain neutre, c'est-à-dire dans une ambassade", entre le chef de l'Etat et son principal adversaire, selon une source diplomatique anonyme.
LES AMÉRICAINS EN POINTE
Il faut trouver "une sortie pacifique et durable à la crise actuelle", a indiqué dans un communiqué publié mardi le ministre français des affaires étrangères, Bernard Kouchner, à l'issue d'un entretien téléphonique avec le président Ravalomanana.
Si les Américains apparaissent en pointe dans la tentative de résolution de la crise, la France ne veut pas être en reste pour des raisons héritées de l'histoire. Madagascar - la quatrième île au monde par sa superficie - est une ancienne colonie française. Elle doit d'ailleurs accueillir en 2010 le sommet de la francophonie. Plus de 20 000 personnes y résident qui détiennent un passeport français (dont la moitié environ de binationaux). Une partie de l'industrie du tourisme de la Grande Ile est contrôlée par des intérêts français. Et c'est aussi à Madagascar que la coopération française est la plus active en Afrique subsaharienne.
Les besoins sont importants pour ce pays essentiellement agricole, dévasté en 2000 et 2004 par des tornades. Selon les estimations de la Banque mondiale, sept habitants sur dix vivent avec moins d'un dollar par jour.
La solidité de ces liens contraste avec des relations diplomatiques délicates. La France n'a plus d'ambassadeur à Madagascar depuis l'été 2008 et la demande du rappel de celui qui était en poste, Gildas Le Lidec, soupçonné d'avoir "le mauvais oeil" par le chef de l'Etat, réputé très superstitieux. Le nom d'un successeur a été proposé à M. Ravalomanana mais sans réponse à ce jour. Dans ce contexte, les autorités françaises ont demandé à leurs ressortissants de limiter leurs déplacements et de constituer des provisions alimentaires. Les lycées français sont fermés. Paris a également placé Madagascar parmi les destinations à éviter.
Les Occidentaux redoutent que la situation se détériore. Selon des informations parcellaires, les troubles du début de semaine ne sont pas limités à la capitale. Des scènes de pillage et d'émeute ont eu lieu en province, qui ne visaient pas seulement des entreprises contrôlées par le chef de l'Etat ou des magasins distribuant des produits de marque lui appartenant.
Jean-Pierre Tuquoi

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